Article "La Liberté" du 21.06.2022
Nouvelle rectrice de la HEP | PH FR depuis juillet 2022, Delphine Etienne-Tomasini veut en conserver la «saveur».
par Magalie Goumaz, rédactrice en chef adjointe, rubrique régionale
Delphine Etienne-Tomasini connaît la maison. Elle travaille pour la Haute Ecole pédagogique (HEP) Fribourg depuis 21 ans. Depuis le 1er janvier 2022, elle en est la co-rectrice ad interim et a été nommée officiellement en avril dernier par le Conseil d’Etat. Elle entre officiellement en fonction le 1er juillet. Elle sait déjà ce qui l’attend.
La formation des enseignants du primaire, assurée par la HEP, va bientôt passer sous l’égide de l’Université de Fribourg, qui forme déjà les enseignants du secondaire I et II et de l’enseignement spécialisé. Vous êtes une directrice de la transition ?
Effectivement. Je serai rectrice jusqu’en 2025 ou 2026, selon la date de démarrage concret du nouveau centre de formation à l’enseignement. C’est prévu ainsi depuis mon engagement. Ensuite, c’est le rectorat de l’université qui reprendra le flambeau.
Et vous étiez tout de même motivée par ce poste ?
Bien sûr, car ces prochaines années, la HEP ne va pas faire que survivre, elle va vivre! J’ai un fort sentiment d’appartenance à cette institution pour laquelle je travaille depuis 21 ans. Avec mes collègues, j’ai envie qu’on puisse construire ensemble le futur.
« Ces prochaines années, la HEP ne va pas faire que survivre, elle va vivre».
Le regroupement avec l’université a été annoncé par le Conseil d’Etat il y a une année. Où en est-on ?
Nous sommes au tout début de ce processus. J’ai intégré un comité de pilotage début janvier. C’est un défi, c’est vrai, et j’entends m’engager pour que la «substantifique moëlle» de la HEP, c’est-à-dire ce qui fait nos caractéristiques et notre «saveur», soit conservée. Il s’agit par exemple de la pratique professionnelle, du lien avec le terrain ou encore du soutien individuel que nous offrons à nos étudiants.
Ce regroupement, c’est un coup de massue pour la HEP ou une perspective réjouissante ?
Ce n’était en tout cas pas une surprise. Depuis le début de la HEP en 2002, nous savions qu’il y aurait un regroupement avec l’université, afin que toutes les filières de formation à l’enseignement se retrouvent sous le même toit. Restait à savoir si c’était celui de la HEP, comme la plupart des autres cantons romands ainsi que Berne, ou de l’université.
C’est l’université qui a été choisie et il faut y voir l’occasion de se positionner au niveau suisse, avec un rayonnement intéressant pour nous. C’est indéniablement une plus-value qui pourrait, avec le bilinguisme, attirer des étudiants d’autres cantons car nous allons offrir un centre de formation unique en Suisse.
Certains craignent pourtant une académisation de la formation des enseignants. Que leur répondez-vous ?
Que c’est un vieux débat, lancé il y a une vingtaine d’années lorsqu’il a été décidé que les HEP décerneraient un bachelor, soit un titre académique. Mais c’est oublier que la formation des futurs enseignants à l’université comprend également des stages pratiques. Ça ne changera donc pas et nous y veillerons.
«Depuis le début de la HEP en 2002, nous savions qu’il y aurait un regroupement avec l’université».
Malgré tout, on peut s’interroger. Faut-il nécessairement un titre académique pour enseigner à des enfants de 6 ans ?
Ce métier est complexe et il ne faut pas croire que plus les enfants sont petits, plus c’est facile. Au contraire, c’est un réel défi qui découle de l’évolution de la société. L’école inclusive, la diversité culturelle ou encore l’intégration du numérique requièrent de solides formations. De plus, un bachelor ouvre des portes. Il permet aux enseignants d’avoir le choix entre enseigner à plein temps ou à temps partiel et de continuer avec un master, par exemple. La filière devient ainsi plus attractive.
Le Conseil d’Etat a dû réagir pour éviter la pénurie d’enseignants en augmentant le nombre d’étudiants. Répondront-ils aux besoins ?
Effectivement. Depuis 2020-2021, nous accueillons une cinquantaine d’étudiants supplémentaires par année. Ce qui fait qu’environ 130 jeunes enseignants arriveront sur le marché du travail en été 2023. Ils devraient répondre aux besoins. Par contre, il y a actuellement des difficultés pour trouver des remplaçants et, dans l’immédiat, pour l’enseignement de l’allemand et du français en tant que langue étrangère/seconde langue aux élèves ukrainiens. Nous collaborons avec les autorités et les services employeurs pour trouver des solutions. Des étudiants ainsi que des collègues ont été sollicités à titre bénévole pour des cours.
Les travaux en cours pour fusionner avec l’université pourraient-ils décourager certains jeunes à s’engager dans cette filière ?
L’annonce de ce regroupement n’a pour l’instant pas engendré une baisse de fréquentation. Nos groupes francophones pour la prochaine rentrée sont déjà pleins.
Et les étudiants alémaniques? La concurrence avec la HEP de Berne est forte. Comment les retenir ?
Cette année, nous sommes parvenus à stabiliser la fréquentation de nos cours par les étudiants alémaniques grâce à une communication accrue, et nous voulons intensifier nos efforts pour rester attractifs. Nous avons à cœur de promouvoir davantage le bilinguisme et l’immersion. Nous venons d’ailleurs de créer un bureau spécifique pour cette tâche. Pour Fribourg, c’est un atout que nous comptons continuer de valoriser.
Bio Express
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Naissance et enfance à Broc.
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Maturité gymnasiale au Collège du Sud.
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Licence en littérature française, philologie romane et histoire contemporaine.
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Diplôme d’enseignement en français-histoire.
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Est engagée à la HEP.
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CAS en leadership et gestion des ressources humaines publics.
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Co-rectrice ad interim et rectorat dès le 1er juillet 2022.